Pascal LARNAUD, ingénieur spécialiste en technologies des pêches, chef de la station Ifremer de Lorient
« Une gestion par quotas de captures »
En quoi viser le zéro rejet peut-il s’avérer bénéfique ?
Soyons d’abord réalistes : nous n’arriverons pas à réduire les rejets à zéro. Bien que leur diminution à la source s’inscrive au travers d’un cadre réglementaire contraignant, elle peut s’interpréter positivement dans le sens où elle va permettre d’atteindre plus facilement le rendement maximum durable des stocks sous quota. On sait qu’une amélioration de la sélectivité, qui revient à capturer les poissons à une taille plus grande, permet d’augmenter le potentiel de production et renouvellement d’un stock donné.
Comment peut-on se rapprocher du zéro rejet ?
Il semble déjà important d’évaluer le taux de survie de certaines espèces, dont les individus une fois pêchés peuvent être remis à la mer et participer à la reconstitution des stocks. Le projet Ensure devrait à cet égard nous apporter des éléments de réponse. Plus globalement, la sélectivité peut être améliorée de différentes façons : fermetures ou évitements de certaines zones à des périodes précises, amélioration de la détection acoustique, installation de dispositifs spécifiques sur les engins, voire changement d’engin… Toutes les pistes sont explorées. Si des pertes commerciales sur des petites tailles sont à craindre dans un premier temps, cet effort doit permettre d’augmenter la productivité et la durabilité d’une exploitation à plus long terme.
Quelles sont les perspectives d’un tel effort ?
Après les quotas d’espèces commercialisées, on s’oriente vers l’instauration de quotas de captures, incluant les rejets, qui faciliteront une gestion plus fine des stocks. Tout l’enjeu consiste maintenant à préserver l’équilibre économique des pêcheries. Dans la mesure où l’amélioration de la sélectivité des engins est poursuivie, il serait inutile de vouloir diminuer à tout prix l’effort de pêche. Si l’on ne veut pas que le poisson devienne un produit de luxe, il faut pouvoir continuer à débarquer des quantités suffisantes. Dans des conditions de durabilité avérées, évidemment. Chaque métier a ses avantages et ses inconvénients. Il ne faut pas en favoriser un plutôt que l’autre sans avoir mûrement réfléchi toutes les conséquences, biologiques et environnementales, mais aussi socio-économiques.